(Vosges) FRANCE
Cet article est un résumé d’une conférence faite à Ste Marie aux Mines en 1959.
La région de Ste Marie aux Mines doit sa célébrité à son sous-sol.
Il semblerait que les Gallo-Romains avaient commencé l’exploitation du secteur suivant une théorie de R. Forrer en 1927. En effet, les monnaies de la région contenaient des traces d’antimoine, dont la provenance ne peut provenir que de cette vallée. Mais jusqu’au Xème siècle, aucune trace d’extraction n’est visible.
Richer de Senones, chroniqueur du XIIIème siècle, relate que des solitaires, sous la conduite du moine Blidulphe, fondèrent début du Xème siècle, le monastère St Guillaume (plus tard d’Echery). Les moines découvrirent que la vallée regorgeait de ressources minières. Un élève de Blidulphe, Guillaume, ancêtre de la famille Echery, commença l’exploitation. Mais, devant les richesses extraites, les moines sont dépossédés de leurs biens par la famille Echery qui s’approprie les mines. La famille Echery édifie ensuite au XIème siècle le château de Hoh-Eckkerich.
En 1317, le droit d’exploitation est concédé au Monastère Cistercien de Baumgarten.
A l’extinction de la famille Echery en 1380, les héritiers sont les Ribeaupierre, ainsi que les ducs de Lorraine. Puis, ces derniers transmettent leur part aux Hattstatt. L’argent extrait est exporté vers Strasbourg, Nancy et St Dié.
Cette phase d’exploitation prend fin au début du XIIIème siècle suite à des inondations dans les mines. A cette époque, les extractions de minerai se faisaient par des puits (Schacht) alors que l’exploitation par des galeries d’évacuation (Stollen) était encore inconnue.
Au XVème siècle les exploitations reprirent, sous la direction de deux seigneuries. Sur la rive gauche de la Liepvrette, ce sont les Ducs de Lorraine qui détiennent les localités de Grand et Petit Rombach, Muesloch, Liepvre, et le Nord de Ste Marie. Sur la rive droite, ce sont les Seigneurs de Ribeaupierre qui détiennent le Sud de Ste Marie, Echery, Fertrup, St Blaise, St Guillaume, Surlatte, Faunoux. Puis l’exploitation cessa.
A cette époque, Ste Marie aux Mines n’était qu’une toute petite bourgade sans importance.
En 1468, reprise de l’activité minière.
En 1486, Guillaume de Ribeaupierre, qui ne peut subvenir aux frais d’extraction, conclu avec l’Archiduc Sigismond d’Autriche un traité sur la répartition des fruits des exploitations minières.
En 1495, l’Empereur Maximilien et les Ribeaupierre reprennent ce traité.
En 1502, Brunon de Ribeaupierre ouvre la mine St Guillaume (Fundgrube)
En 1526, un nouveau traité est réalisé entre Guillaume II de Ribeaupierre et l’Archiduc Ferdinand d’Autriche, pour payer les fournitures de bois pour les mines. A cette époque, 61 galeries étaient ouvertes côté alsacien : 37 rentables, 16 non rentables, et 8 abandonnées. Côté lorrain : 5 mines ouvertes dont Ste Anne, St Esprit et St Jean (Liepvre). Ces trois mines sont concédées en 1530 par le Duc Antoine de Lorraine à Claude de Bauveau.
En 1545 Sébastien Munster visita les mines côté alsacien. Il signale au total 80 puits et galeries, avec entre autres: 16 à Fertrup (Furtelbach) dont Fundgrube, Rumpapomp, St Jean, Fürstenbau ; 4 autres à Surlatte (Surbetz) et 10 à Schmelzhütte.
En 1528, les exploitations ont rapportées 6500 marks d’argent soit 1625Kg d’argent pur.
En 1537, amélioration d’importance : une grande galerie d’évacuation des eaux minières en profondeur de Furtelbach a été creusée (Erbstollen). Cette galerie de 8000m de long est destinée à drainer les eaux des mines en profondeur, et à l’évacuer vers le bas de la vallée.
En 1561, Charles VI, Duc de Lorraine, règlemente l’exploitation des 12 mines d’argent, de plomb et de cuivre du côté lorrain. Munster parle de 2000 à 3000 mineurs qui travaillent sans arrêt en se relayant. C’est alors que se constitue la ville de Ste Marie aux Mines, avec l’installation de ces mineurs dans des maisons en bois. 1200 maisons furent construites, avec 70 auberges ! Mais, cette ville naissante est presque entièrement ravagée par un grand incendie en 1589. Puis, c’est à nouveau le déclin.
En 1602, il n’y a plus du côté alsacien que 18 mines en activité : 8 « am AltenBerg » dont Fundgrube, Ste Barbe, St Philippe, et 10 « am Neuenberg » dont St Jean, St Jacques et St Guillaume.
En 1612, il y a 12 mines en activité côté lorrain.
En 1623, 22 puits restent en activité à Ste Marie, mais les mines côté lorrain sont épuisées.
En 1627, on ne compte plus que 250 mineurs.
La guerre de 30 ans sonne le glas de toutes les activités minières, et en 1648, la région devient, un véritable désert.
Pendant toute la période de splendeur, les mines de Ste Marie ont fourni de l’argent métal à la ville libre de Strasbourg, à la Régence d’Ensisheim, à Thann, à Bâle, à Sélestat, à l’Abbaye de Murbach, à Bergheim dépendant des Habsbourg (Autriche).
En 1696, petite reprise de l’activité minière.
En 1711, Chrétien II de Birkenfeld, duc des Deux-Ponts, héritier des Ribeaupierre, concède les mines alsaciennes à Simon Knoll et Nicolas Sederer. Puis, après de nombreux déboires, la Société Knoll/Sederer passe l’affaire en 1734 aux Sieurs Schneider et Kroeber qui y engloutissent eux aussi tous leurs capitaux.
En 1724, les mines côté lorrain sont concédées à la Société Saur, mais la réouverture est un échec.
En 1740, après reprise de l’activité, 500 personnes environs sont employées aux mines. C’est alors que fut fondée « l’Union des Cie Alsaciennes et Lorraines » promis à un bel avenir. Mais catastrophe en 1749: suite à d’importantes inondations, la galerie principale d’évacuation des eaux profondes Erbstollen se boucha et s’éboula en partie. Ceci entraîna le noyage de nombreuses galeries. Puis, cette galerie de 8000m de long a été recreusée et les eaux s’évacuèrent de nouveau en 1766. Mais voilà, tout le reste des capitaux disponibles ont été utilisés dans les travaux de cette galerie, et la Société a fait faillite en 1767. Presque tous les mineurs ont alors quitté le pays.
En 1779, reprise de l’activité : St Philippe et Surlatte dont on extrait du plomb, St Guillaume et St Jacques de l’argent, Gabe Gottes de l’argent et du cuivre, et la Petite Lièvre de l’argent.
De Dietrich qui visita les mines en 1785 rapporte que 150 mineurs travaillent dans 30 mines.
De 1789 à 1796 nouvel arrêt de l’exploitation.
Puis de nouvelles tentatives infructueuses de réouverture sont faites en 1806, 1817, 1824, 1838, 1874, 1883, 1893, avec à chaque fois, la faillite du nouveau propriétaire.
En 1897, une compagnie allemande a mis le paquet avec 573 mineurs et du matériel moderne. Mines retravaillées : Engelsbourg, Fürstenstollen, Kobalt, et Gabe Gottes. Mais, après un coût énorme et beaucoup d’efforts, les travaux restèrent infructueux et l’activité est à nouveau arrêtée.
En 1940, une extraction d’arsenic à la Giftgrube sera le dernier élément extrait.
Ainsi s’achève ce long épisode des mines de Ste Marie.
La richesse et la diversité des minéraux fournis de tous temps par ces mines ont fait la joie de beaucoup de collectionneurs. Par exemple, en 1574, Frédéric et Guillaume de Bavière demandent à Eguénolphe III de Ribeaupierre des échantillons minéralogiques. Idem en 1640 par Gaston d’Orléans, en 1772 du Sieur Monnet, etc.
Les trouvailles remarquables sont : en 1530 à St Jacques un argent natif de 25kg ; en 1540 à la Porte de Fer un bloc d’argent de 88kg ; en 1581 à Zur Treu un bloc d’argent pur de 592kg, d’énormes cristaux de proustite etc.
Au fait, comment se faisait la recherche des filons métallifères à l’époque ? Avec une baguette de sourcier !…
En conclusion, on peut se poser une question : les parties de filons accessibles ont été vidées. Mais en grande profondeur, combien en reste-t-il ?
Ci-dessous, quelques extraits du livre minier Agricola de 1520.
La mine Saint Jean Engelsbourg est sécurisée et visitable au Parc Minier à Tellure.
Voir sur le site : tellure.fr
Ancien plan des mines.
Recherche des filons.
Travail du bois pour la mine.
Les chariots miniers (Hunde).
Mineurs allant au travail.
Systèmes de pompage.
Un treuil.
Le bocard de broyage du minerai.
Les travaux dans la mine.
Les fours.
La mine visitable Saint Jean Engelsbourg au Parc Minier à Tellure.