Bouxwiller 2015 : les ovoïdes ont de nouveaux parents !

Par KUNTZ Pierre

Tout d’abord un grand merci à Jorge F. GENISE (Museo Argentino de Ciensas Naturales – BUENOS AIRES) et à André NEL (Musée National d’Histoire Naturelle de PARIS) pour leur aide précieuse dans le domaine de la paléo-entomologie.

Cet article n’est encore qu’une ébauche, en raison de l’absence notamment d’une étude sédimentologique complète, mais elle est nécessaire à la connaissance de ces structures et surtout justifiée par les nombreuses consultations sur notre site de l’ASAM de mon précédent article.

Résumé :

De nouveaux éléments dans l’étude des ovoïdes de la carrière située derrière l’église catholique ( 48°49’20 » N et 7°28’34 » E ) à Bouxwiller (Alsace – FRANCE), m’ont amené à revoir une nouvelle fois l’écosystème de ce lac d’eau douce du Lutétien moyen.
La détermination de spécimens atteignant 8 centimètres de long, en tant que cocons de guêpes géantes, et contenant souvent des cocons de petites guêpes parasites, a permis d’affiner les relations entre ces insectes et changer radicalement notre vision de ce milieu très particulier.

Abstract :

New elements in the studies of ovoids from the quarry, behind the catholic church at Bouxwiller (Alsace – FRANCE), bring an other sight on this middle lutetian lake.
Big ovoids, reaching 8 centimetre long, determined as cocoons of giant wasps and containing often little parasite wasps cocoons, give us a vision more fine on this particular tertiary ecosystem.

LES STRUCTURES RECONNUES

A) Les structures issues de la flore.

1)Les algues

a)Les characées

Les oogones de characées sont typiques des calcaires d’eau douce. Ces petites structures millimétriques présentent une construction carbonatée avec une structure en spirale. En général sphériques, elles peuvent également être allongées.
Ces plantes apprécient les eaux peu profondes et ensoleillées et ne craignent pas les eaux très calcaires. Elles préfèrent les eaux douces et claires, stagnante ou à faible courant. Un environnement faiblement à moyennement riches en éléments nutritifs leur convient mais elles sont victimes de l’eutrophisation qui transforme les lacs peu profonds en marais.
Elles sont présentes dans plusieurs niveaux marneux et calcaires mais passent souvent inaperçues.

b)Les oncolithes

Bien qu’issues des cyanobactéries, ces structures sont souvent rangées parmi les algues dont elles prennent l’aspect.
Elles peuvent présenter des formes hémisphériques en moule externe notamment lorsqu’elles se sont formées sur des coquilles de gastéropodes.
Dans ce gisement leur construction est lente et ne forme ici que des structures inférieures au centimètre.
En section, elles montrent souvent des cercles allant jusqu’à deux millimètres de diamètre et correspondant au moule de l’appareil végétatif de plantes aquatique ou semi-aquatique.
Dans ces niveaux, les dépôts d’oncolithes ne semblent pas indigènes et se seraient formés près du rivage.

2)Les végétaux aériens

a) Quelques rares spécimens correspondent à des moules internes et externes de petites structures sphériques atteignant 7 mm de diamètre. Elles présentent une surface composée de bosses et de creux, elles proviennent des couches de calcaire compact.
F. GEISSERT, éminent paléontologue, les a déterminées comme étant des noix de Celtis éocénique, car ne peuvent être fossilisées dans ce type de gisement que les éléments végétaux contenant des parties minéralisées. Les noix de Celtis font partie des rares structures végétales contenant du carbonate de calcium dans la structure de leur coque.
Récemment, un exemplaire complet a pu être dégagé d’un calcaire blanc compact.

b)Les empreintes végétales préservées dans les oncolithes sont de 3 types.
Les tubes d’oncolithes en section longitudinale montrent soit des stries fines soit un assemblage de cellules végétales d’une grande finesse.
Ces appareils végétatifs tubulaires rappellent ceux de plantes aquatiques du genre Juncus.
Parfois un dépôt plat a préservé un fragment végétal avec notamment en relief quelques nervures d’une feuille.

B)Les structures en coquille d’œuf

Dans un sédiment où les coquilles de gastéropodes sont nombreuses il peut sembler difficile de reconnaître un bout de coquille d’œuf d’oiseau ou de reptile.
L’agencement des cristaux de carbonates de calcium qui composent ces coquilles est pourtant différant.
Les coquilles des mollusques se doivent de résister à divers agressions, pendant des mois, voire des années, et sont donc renforcées par une structure composée de plusieurs couches dont les cristaux de carbonates (Calcite et Aragonite) ont des orientations croisées.
Les coquilles des œufs doivent être résistantes mais pas trop afin de permettre au futur nouveau-né de briser son habitacle. Les cristaux qui composent ces coquilles présentent en général une croissance perpendiculaire à la surface de la coquille. Celle-ci peut être divisée en deux couches avec une couche externe dite columnaire et une couche interne dite mamillaire.
Les coquilles d’œufs d’oiseaux et de dinosauriens présentent généralement une couche columnaire épaisse assurant la solidité de la structure et donc une résistance à l’écrasement. Chez les reptiles celle-ci est plus fine voire plus ou moins discontinue et la protection de l’embryon est assurée principalement par une membrane nettement plus épaisse.

1)Les œufs d’oiseaux

La structure des œufs d’oiseaux est caractéristique en ce qu’elle présente une solidité due à la cohésion des cristaux qui la constitue. Comme cette coquille est relativement solide, la membrane qui entoure l’embryon est fine.
Les coquilles d’œufs d’oiseaux proviennent des couches calcaires et marneuses.

a)Dans les couches calcaires les coquilles d’œufs sont fragmentées en éléments dépassant rarement le centimètre, sont de couleur brune, ont une épaisseur de 0,8 à 1,0 millimètre et présentent une surface plus ou moins vermiculée. Un unique spécimen trouvé entier a environ 3,5 centimètres de long et de 2,5 à 2,7 centimètres de diamètre.
La section présente les couches mamillaires et columnaires typiques des œufs d’oiseaux. Elle montre également une différence de coloration avec environ 1/3 de la partie interne d’une couleur brun clair et les 2/3 de la partie externe d’une couleur brun plus foncé.
Les vermicules correspondent à un critère que je considère comme archaïque et qui indique que ces œufs étaient recouverts de feuilles dont la fermentation exothermique faisait office de couveuse. Les vermicules empêchaient les feuilles de ces végétaux de coller à la coquille et donc de colmater les pores nécessaires à la respiration de l’embryon. Les œufs de l’Emeu et du Casoar à casque présentent encore cette caractéristique structurelle.
La couleur marron ne semble pas liée aux conditions de fossilisation ou à la nature des sédiments mais indique que ces œufs étaient sans doute colorés, afin d’échapper au regard des prédateurs.

b)Dans une couche marneuse une coquille d’œuf de couleur marron, de 7 mm de long et de 0,2 à 0,25 mm d’épaisseur, présente une surface lisse sans pore visible. La section montre une structure propre à celle des œufs d’oiseaux. Il s’agit sans doute d’un œuf que je qualifierais de moderne de par sa surface lisse signe, à priori, d’une couvaison par au moins un parent. La taille du spécimen ne permet pas d’extrapoler les dimensions de l’œuf entier.

2)Les œufs de crocodiles

Dans la nature les œufs de crocodiles sont blancs, leurs coquilles sont fragiles et ils comportent une membrane épaisse.
Ces coquilles se brisent facilement en très petits fragments et sont donc difficiles à observer dans les sédiments fossiles. En effet leur structure présente une surface externe lisse et continue, percée de nombreux pores bien visibles mais la surface interne montre des cristaux de carbonates de calcium peu solidaires.

a)Ils sont présents en petit nombre dans les couches calcaires. Ces fragments ont quelques millimètres de long et de 0,4 à 0,5 millimètres d’épaisseur. Ils sont très blancs et formés en apparence de deux couches qui semblent bien délimitées, une couche supérieure continue et une couche inférieure discontinue. Cette distinction semble liée à la différence entre une partie externe continue et une partie interne discontinue, accentuée par l’attaque des micro-organismes. Ces fragments sont parfois presque entièrement altérés, ne laissant qu’un moule externe. La surface externe est lisse mais la surface interne présente comme de petites ocelles individuelles qui correspondent aux éléments composant la couche mamillaire.

b)Dans une couche marneuse un petit fragment de coquille de couleur beige, associé à un agglomérat d’oncolithes, présente une surface externe lisse mais avec de nombreuses anfractuosités. En épaisseur elle ne fait que 2 à 3 dixièmes de millimètres. Cette coquille est fragile et la cassure montre qu’elle est constituée pratiquement que de cônes très peu solidaires. Il s’agit bien d’un fragment d’œuf de crocodile dont l’espacement des structures rappelle celui des œufs d’Alligators.

LES STRUCTURES A DETERMINER

Des années de recherches dans ce gisement ont induit un premier tri visuel entre les plus gros ovoïdes qui, en apparence du moins, semblent correspondre à une seule espèce et les nombreux ovoïdes nettement plus petits et montrant une plus grande variabilité de forme et de structure.

A) Les gros ovoïdes

De 6 à 8 cm de long et de 2,5 à 3 cm de diamètre, ce sont les plus grosses formes observées dans ce gisement.
Elles sont hétéropoles avec une extrémité arrondie et une extrémité pointue ou évasée par laquelle le nouveau-né sort. Elles présentent parfois un élargissement à environ 1/3 de la sortie.
Une déformation d’un certain nombre d’exemplaires avec un léger coude au milieu ainsi qu’une calcification plus importante dans la partie supérieure, indiquent un léger tassement de la structure avant durcissement.
L’observation de l’ouverture nécessite un dégagement en finesse et en suivant le contour réel du fossile.
Quelques spécimens rares présentent un léger aplatissement donnant une section ovale (diamètre de 2,2 à 2,4 cm par exemple) alors qu’en règle générale, la section est bien circulaire. Les spécimens étudiés semblent indiquer que cette déformation n’est pas consécutive aux conditions de fossilisation. Elle semble montrer une certaine souplesse de la structure alors que les spécimens incomplets indiquent qu’elle est néanmoins cassante.
Des stries grossières, irrégulières et en relief ornent la structure perpendiculairement à l’allongement avec un motif légèrement hélicoïdal
Entre la partie la plus large et l’extrémité pointue j’ai pu observer occasionnellement comme une zone de rupture.

Ces gros spécimens contiennent souvent de petits ovoïdes qui ont généralement sédimenté en partie ventrale, avant fossilisation. Certaines de ces petites structures ont été poussées de l’intérieur des gros ovoïdes vers l’extérieur, perçant la cloison et se retrouvant fossilisées encore coincées par celle-ci .
Un autre spécimen montre qu’un petit ovoïde a été poussé de l’intérieur vers l’extérieur formant une bosse sur laquelle un enchevêtrement de fibres a été conservée en relief. La déformation de l’habitacle a dû se faire avant durcissement ce qui tend à prouver la volonté de l’habitant de se débarrasser d’une structure gênante.

Le positionnement de ces ovoïdes par rapport à la stratigraphie est généralement proche de l’horizontale pour les spécimens entiers ce qui milite en faveur d’un enfouissement peu turbulent.
La quantité de spécimens observés constitue également un critère remarquable. En effet, lors de travaux de la mise en place d’une canalisation de gaz, ces ovoïdes ont été ramassés par centaines.
Ces différentes observations ont été comparées à toutes les structures similaires encore existantes comme œufs de crocodiles, de boas, de varans ou pupes de guêpes géantes, constructions d’insectes et cocons de papillons.

Les œufs de reptiles présentent des tailles et des formes similaires. Ceux de crocodiles et de varans sont généralement homopoles. Ceux des boas sont plutôt hétéropoles. A l’éclosion les membranes en tendance à s’affaisser, par manque de rigidité.

-Les pupes de guêpes géantes comme les Pepsis ont une forme hétéropole, une taille et une structure assez proche de celles des ovoïdes de Bouxwiller. On peut y voir de fines stries donnant un motif hélicoïdal.
Elles s’en différencient par une surface nettement plus lisse et une ouverture à section bien nette lors de l’éclosion.
Actuellement les Pepsis sont plutôt affiliés au continent américain avec la grande Pepsis heros (jusqu’à 8 cm) mais vivant dans un environnement plus sec. En Asie, Megalara garuda (jusqu’à 6,5 cm) vit dans un environnement plus humide mais semble plus rare que Pepsis heros.
Lors de la sortie de sa pupe, le Pepsis semble découper circulairement une extrémité.
La larve de Pepsis est régulièrement parasitée par des guêpes plus petites.

-Les constructions d’insectes sont très diverses en forme et en tailles mais présentent souvent des structures liées à la fabrication et généralement des ouvertures circulaires latérales. Les gros ovoïdes de Bouxwiller n’ont jamais d’ouverture circulaire latérale. La micrite n’englobe que la structure elle-même sans trace d’une éventuelle construction, ni en section, ni en surface. Les petits ovoïdes ayant traversé la cloison de certains gros ovoïdes semblent exclure totalement l’hypothèse d’une construction.

-Les cocons de papillons ont également des formes et des structures proches de ces ovoïdes. Certains de ces cocons sont hétéropoles, ont une structure plus ou moins souple avec des stries grossières dues au tissage de la soie et plutôt perpendiculaires à l’allongement.
Les chenilles sont régulièrement parasitées par des mouches ou des guêpes. Et l’ouverture chez certains spécimens rappelle étonnamment l’ouverture très particulière des cocons des Saturnidés européens comme Saturnia pyri.

La variation de l’ouverture pourrait être un critère pour définir des espèces mais la structure de ces ovoïdes ne présente aucune différence notable. Il n’est pas exclu que la variation d’ouverture soit liée au stade d’éclosion au moment de la fossilisation.

Attribution des gros ovoïdes :

Par élimination ces structures sont soit des pupes de guêpes géantes soit des cocons de grands papillons de nuit. Les structures produites par ces insectes présentent une taille similaire insuffisante à les départager.

Les critères propres à ces deux familles doivent tout d’abord être recensés et analysés.
La solidité de la structure, sa forme, son aspect et son ouverture sont les principales caractéristiques observables à l’œil nu.

SOLIDITÉ :
Pour des ovoïdes de cette taille il est essentiel que ces habitacles aient une solidité permettant la fossilisation.
Les pupes de guêpes sont constituées, du moins pour certaines, d’une coque de chitine souvent additionnée de soie. Celle-ci est en même temps rigide et donc cassante mais tout en montrant une certaine souplesse.
Les cocons de papillons de nuit sont constitués pour la plupart d’un enchevêtrement de fils de soie. Néanmoins seuls certains d’entre eux ont une bonne rigidité, une faible souplesse et une bonne résistance à la cassure.

FORME :
La forme hétéropôle et allongée semble identique dans les deux cas.
Les gros ovoïdes fossiles présentent tous un aspect très similaire mais il est notable que certains montrent un léger coude résultant du tassement de l’édifice avant durcissement.
Ce coude relèverait, du moins pour ces exemplaires, d’une position plus ou moins horizontale lors de son élaboration.
Cette observation ne semble pas typique d’une des deux familles.

ASPECT :
L’aspect superficiel montre une surface peu lisse avec une striation hélicoïdale irrégulière mais peu flagrante.
Les sections montrent que l’édifice a du être plutôt fin et résistant avec peut être une coque en chitine et recouverte de soie.

OUVERTURE :
Malgré une grande similitude d’aspect de ces gros ovoïdes, l’ouverture semble variable.
En effet certains présentent une extrémité pointue, d’autres une extrémité évasée et d’autres une fracture circulaire avant l’extrémité.
Une section montre un élargissement dû à la présence du thorax et des pattes ainsi qu’un orifice de sortie peu évasé.
Une hypothèse parmi d’autres supposerait que les premiers n’ont pas éclos et que chez les suivants, un dimorphisme sexuel privilégie soit une ouverture chimique soit une ouverture mécanique en fonction de la présence ou non de mandibules par exemple.

L’attribution de ces gros ovoïdes à des cocons de Saturniidae semble moins pertinente qu’une attribution à des pupes ou chambres nymphales d’une guêpe géante comme la Pepsis heros du continent américain. La taille, la solidité et une striation plus ou moins hélicoïdale coïncident ; seule l’ouverture ne semble pas correspondre.

B) Les petits ovoïdes

(Certains spécimens, atteignant 30 mm, ne peuvent être considérés comme étant de petits ovoïdes mais la qualification de « petits » ne sert ici qu’à distinguer ce groupe dont les tailles varient de 9,5 à 30 mm d’un autre groupe qualifiés de « gros » et dont les tailles varient de 60 à 80 mm.)

Parmi ces ovoïdes j’ai pu observer des variations de forme, de structure et de taille mais cette dernière ne constitue pas un critère de détermination fiable.
L’étude s’attachera à éviter de multiplier les différences en ne gardant que les critères les plus distinctifs ou les plus significatifs.

Certains de ces ovoïdes sont complets, creux formant une géode de Calcite alors que d’autres sont remplis de sédiment et sont souvent incomplets comme éclos.
Il est intéressant de constater que les ovoïdes non éclos présentent parfois un dépôt de micrite très fine en partie inférieure et de la calcite cristallisée dans sa partie supérieure ce qui précise la position de l’ovoïde au moment de son enfouissement dans le sédiment. Ce phénomène confirme en général qu’on est bien en présence d’un fossile et non d’une structure consécutive à des phénomènes physiques.
Dans ce cas il est possible qu’après éclosion la membrane relativement rigide ait repris sa forme initiale et que de la boue très fine ait néanmoins pénétré dans l’habitacle pour ensuite sédimenter en partie basse.
Certaines de ces structures montrent une rupture assez nette et plutôt perpendiculaire par rapport à l’allongement et d’autre des coupures parallèles à l’allongement.
Certaines semblent avoir été faites au moment de la naissance et d’autres sont sans doute d’origine mécanique.

Ces structures sont et restent pour le moment des ichnofossiles et le rattachement à des structures déjà déterminées en ichnogenres et en ichnoespèces ne peut être que transitoire en raison notamment des éloignements géographiques et stratigraphiques et en l’absence d’études plus spécifiques.
Un rangement par type s’avère nécessaire mais reste néanmoins relativement subjectif en raison des variations possible au sein d’une même espèce.

Type 1)
Longueur : 9,5 mm
Diamètre : 4,2 mm
Forme : homopôle et allongée
Occurrence : seulement 2 exemplaires
Observations: toujours non éclos et plus ou moins déformés
Structure : mole
Commentaires: un exemplaire montre à une extrémité une déformation semblable à celles visibles sur les œufs (pupes) de fourmis et due à la manipulation par les ouvrières. L’autre extrémité montre une calcification qui semble le confirmer.
Conclusion : Il est probable qu’il s’agisse de pupes d’insectes encore à déterminer.
Il est également possible que ces rares exemplaires soient des spécimens avortés
du type 2 et cela malgré une structure mole.

Type 2)
Longueur: 9,5 mm
Diamètre: 5,0 mm
Forme: homopôle, trapue et arrondie
Occurrence : pas rares
Structure: dure et lisse
Observations: Ces petits ovoïdes constants en forme et en taille peuvent être trouvé éclos ou non éclos. Leur petite taille fait qu’ils passent souvent inaperçu.
Commentaires: Ils sont la plupart du temps présents dans une couche calcaire associés avec les gros ovoïdes. Un spécimen a même été trouvé à l’intérieur d’un de ces derniers.
Conclusion : Leurs caractéristiques (taille / forme / rigidité) sont proches de celles de pupes, non segmentées, de guêpes parasites comme les Campopleginae.

Type 3)
Longueur: 12 à 20 mm
Diamètre: 7 à 10 mm
Forme : homopôle, trapue, arrondie, parfois déformée
Structure: mole et plutôt lisse mais avec de minuscules pustules organisées de façon hélicoïdale
Occurrence : courant
Observations : non éclos ou éclos.
Ce sont les ovoïdes fréquemment trouvés à l’intérieur des gros ovoïdes et il n’est pas rare de rencontrer deux spécimens côte à côte, parfois même déformés l’un par l’autre.
Parfois un ou deux spécimens se trouvent en travers de la cloison des gros ovoïdes, preuve d’une pression exercée de l’intérieur vers l’extérieur de l’habitacle pouvant occasionner une déformation de ceux-ci.
Commentaires: Il semble que la présence de ces structures à l’intérieur des gros ovoïdes soit une spécificité de ce gisement.
Conclusion : la striation hélicoïdale est caractéristique des pupes de guêpes. Ces spécimens sont à rapprocher des pupes de Rebuffoichnus sciuttoi (Genise et al. 2007) et autres cocons de guêpes.
La présence de pustules devrait permettre de définir un nouveau genre.

Type 4)
Longueur: 21 à 25 mm
Diamètre: 9 à 11,5 mm
Forme: hétéropôle et allongée présente souvent une petite calcification à l’extrémité arrondie comme un reste d’une accroche à un support
Occurrence : courant
Structure: dures et lisses
Observations: Plus souvent rempli de sédiment que creux. Pas d’ouverture observée ce qui peut être dû à une reprise de la forme après éclosion.
Commentaires: L’absence de structure hélicoïdale exclue les pupes de guêpes. La présence d’un bouton terminal semble spécifique.
Conclusion : Le bouton terminal semble typique des cellules construite par les abeilles de la famille des Apinae.

Type 5)
Longueur: 17 à 18 mm
Diamètre: 9,5 à 10 mm
Forme: homopôles trapus arrondis
Occurrence : relativement courant
Structure: dures, trapues avec des stries hélicoïdales
Observations: non éclos ou éclos
Commentaires: La structure rappelle fortement celle des cocons de certaines guêpes.
Conclusion : Comme le type 3 on est en présence de cocons de guêpes comme Rebuffoichnus sciuttoi (Genise et al. 2007) mais d’une espèce vraisemblablement différente.

Type 6)
Longueur: 15 à 17 mm
Diamètre: 8 à 8,5 mm
Forme: homopôles, arrondis, déformés et fendus
Occurrence : peu courants
Structure: dures, lisses
Observations: éclos avec des ruptures de paroi plutôt longitudinales
Commentaires: En apparence ces ovoïdes montrent des déchirures comme on peut l’observer chez les œufs de petits reptiles. Toutefois le maintient de la forme générale de l’ovoïde montre que ces structures devaient être relativement rigides. Au cas contraire elles auraient subit un aplatissement sous le poids des sédiments, même légers.
Conclusion : Il est plus vraisemblable que ces spécimens correspondent à d’autres types mais dont la rupture de la paroi serait d’origine taphonomique.

Type 7)
Longueur: 23 mm
Diamètre: 12,5 mm
Forme: homopôles, trapus, arrondis avec une double paroi
Structure: dure avec paroi interne lisse et paroi externe rugueuse
Occurrence : rare
Observations: éclos, la paroi interne est lisse et dure, la paroi externe est irrégulière et comporte en surface des éléments calcaires disparates.
Commentaires: Initialement attribués à des œufs de tortues, ces structures rappellent néanmoins certaines constructions réalisées par des insectes comme des coléoptères.
Conclusion : Si on prend en compte l’épaisseur du sédiment entre les deux parois ; certaines constructions épaisses ont été attribuées à divers insectes comme des guêpes maçonnes ou des charançons par exemples et d’autres plus fines à des coléoptères. Ces ovoïdes pourraient être rapprochés de ceux attribués à un coléoptère fossile nommé Rebuffoichnus casamiquelai mais l’absence notoire d’une ouverture latérale circulaire empêche d’accréditer cette hypothèse.
Les éléments présents en surface de la paroi externe ne semblent pas provenir de la construction mais auraient plutôt une origine diagénétique.

Type 8)
Longueur: 30 mm
Diamètre: 11 mm
Forme: hétéropôles, très allongés, et déformés
Occurrence : peu courant
Structure: mole et lisse
Observations: le plus souvent éclos
Commentaires: La déformation de ces spécimens longs et relativement fins est remarquable. Elle peut être observée sur certains œufs de Colubridés mais ces derniers auraient du être écrasés par le sédiment.
Conclusion : Pour le moment il n’est pas possible d’opter pour une famille. Peut-être s’agit-il de spécimens sexués apparentés à un autre type d’insecte coloniaux ?

Type 9)
Longueur: 15 mm
Diamètre: 8,5 mm
Forme: homopôles trapus carrés
Occurrence : rare
Structure: dure, stries hélicoïdales (éléments organisés préservés par la calcite)
Observations: éclos, parasite
Commentaires: Un spécimen trouvé à l’intérieur d’un gros ovoïde montre une structure hélicoïdale dont l’empreinte a été préservé par de la calcite. Celui-ci montre un assemblage régulier de petites sécrétions triangulaires qui sont déposées et accolées avec précision.
Sa présence à l’intérieur d’un gros ovoïde indique qu’il s’agit d’une pupe d’un insecte parasite.
Conclusion : Il s’agit sans doute là d’une pupe de guêpe parasite d’une guêpe géante.
La structure de ce spécimen prouve que les ovoïdes sont bien des fossiles. Ce spécimen devrait être attribué à un nouveau genre en raison des micro-éléments qui le constitue.

Type 10)
Longueur: variable
Diamètre: variable
Forme: homopôle mais prolongé par un tube
Occurrence : peu courant
Structure: plutôt rugueuse
Observations: ces formes viennent en contradiction avec les ovoïdes strictes
Commentaires: ces structures sont à rapprocher à d’autres traces fossiles trouvées dans différents gisements et qui ont été attribuées à des abeilles fouisseuses. La préservation d’une partie de galerie indique un apport d’un morceau de paléosol.
Conclusion : Un exemplaire peut être rattaché à Celliforma germanica mais il semble contradictoire de trouver aussi peu d’exemplaires de chambres nymphales d’abeilles qui auraient tendance à vivre en colonies importantes.

Attribution des petits ovoïdes :

Les conditions très particulières de fossilisation de ce gisement ont permis la conservation d’empreintes de structures généralement périssables.
La finesse de la micrite a même favorisé la préservation de structures intérieures et même parfois les éléments microscopiques constituant celles-ci.
La variation des petits spécimens inclus, avec parfois comme une double cloison, semblent indiquer que le parasitisme n’est pas la seule cause de leur présence. En effet un doublement de cloison correspond plutôt à une chambre nymphale d’un coléoptère qu’à celle d’un hyménoptère. Ces fossiles pourraient être rangés dans l’ichnogenre Fictovichnus.

D’autres spécimens présentant une double cloison semblent pouvoir être reliés à des constructions de coléoptères supposés charognards, car présent dans de gros ovoïdes cassés.

Quelques spécimens présentent des similitudes avec des structures attribuées à des Hyménoptères qui construisaient des galeries terminées par des chambres nymphales. Ces structures ont été classées dans la famille des Celliforma.
Quelques rares spécimens très allongés n’amènent, pour le moment, aucune supposition notable.

Les ouvrages actuels traitant de l’évolution considèrent que les parasites sont plus nombreux qu’il n’y paraît et, bien que ceux-ci n’ont pas d’intérêt à la mort de leur hôte, exercent sur ces derniers de fortes pressions sélectives. Si l’on considère que les petits cocons inclus sont des pupes de petites guêpes se développant au détriment de guêpes géantes, on parlera alors plutôt alors de parasitoïdisme que de parasitisme.
Par contre la variété des ovoïdes présents dans les grands cocons et les spécimens poussés en travers des parois de ceux-ci plaident en faveur d’une communauté d’insectes plutôt parasites, les guêpes géantes étant elles-mêmes des parasitoïdes des araignées géantes.

CONCLUSION :

Ce nouvel article remet en cause les articles précédents mais constitue néanmoins une avancée notable dans l’étude des ovoïdes de Bouxwiller.
Il permet de rattacher ces structures à des ichnofossiles identiques trouvés et décrits dans divers pays.
Une fructueuse collaboration avec le professeur argentin Jorge F. GENISE, dont un bon nombre d’articles analysent et décrivent des structures identiques, m’a permis de franchir une étape supplémentaire dans la détermination de ces ovoïdes.

En attendant de pouvoir déterminer le genre et l’espèce de chaque insecte ayant produit ces ichnofossiles, ces ovoïdes ont été plus ou moins rattachés à des ichnogenres et des ichnoespèces. Certains ovoïdes, comme notamment les plus gros, devront sans doute être classés dans un nouveau genre ainsi que dans une nouvelle espèce.

Il est évidemment bien tentant d’appeler, par exemple, les gros ovoïdes « EOPEPSIS buxowillanum » ou « Rebuffoichnus giganteum » par exemple, puis d’attribuer aux « petits » ovoïdes de nouveaux noms d’ichnoespèces voire d’ichnogenres, en attendant une énième révision.
Mais le plus important n’est-il pas de considérer, de comprendre et de reconstituer ce paléo-environnement vieux de 45 millions d’années où j’entrevoie de grosses mygales paralysées par d’impressionnantes guêpes, pour alimenter leurs larves, elles-mêmes parasitées par diverses guêpes nettement plus petites, servant elles-mêmes de proies à des oiseaux en cours d’évolution ?

BIBLIOGRAPHIE :

-(2002) Fossil bee nests, coleopteran pupal chambers and tuffaceous paleosols from the Late Cretaceous Laguna Palacios Formation, Central Patagonia (Argentina) – Jorge F. Genise, Juan C. Sciutto, José H. Laza, Mirta G. González, Eduardo S. Bellosi

-(2004) Chubutolithes gaimanensis and Other Wasp Trace Fossils: Bearing through the Taphonomic Barrier – Kansas Entomological Society – Jorge F. Genise and Gerardo Cladera

-(2007) New insect pupation chambers (Pupichnia) from the ,Upper Cretaceous of Patagonia, Argentina – Jorge F. Genise,Ricardo N. Melchor, Eduardo S. Bellosi, Mirta G. González and Marcelo Krause

-(2009) Cleptoparasitism and detritivory in dung beetle fossil brood balls from Patagonia, Argentina – M. Victoria Sanchez and Jorge F. Genise

-(2010) Sedimentology, diagenesis and ichnology of Cretaceous and Palaeogene calcretes and palustrine carbonates from Uruguay – Ana M. Alonso-Zarza, Jorge F. Genise and Mariano Verde

-(2011) Fossil cocoons associated with dinosaur egg from Patagonia, Argentina – Jorge F. Genise and Laura C. Sarzetti

Ovoïde type 9.

Pupe de guêpe.

Fragment d’oeuf de crocodile.

Section d’oeuf d’oiseau.

Pupe type 4.

Section d’oeuf d’oiseau.